REBELLION AU CAMEROUN: BABA LADE SE CACHE-T-IL DERRIERE?
(François Djékombé, interviewant Baba Ladé le 11.02.2014, N'Djamena) |
L’ancien Chef rebelle du Front
populaire pour le redressement (FPR), Abdelkérim Baba Ladé, alias Général
Baba Ladé rentré au Tchad en 2012 après s’être volontairement rendu aux
autorités centrafricaines continue d’être source d’inquiétude. Les autorités camerounaises
l’auraient accusé d’activer le feu sur leur territoire en se cachant derrière
une rébellion qui a attaqué l’ouest
camerounais et endeuillé quelques familles. Le 3 février 2013, le président
Idriss Déby Itno l’a reçu en audience privée. Nous sommes allés à sa rencontre,
à N’Djamena le 11 février 2014 pour obtenir sa version des faits.
Interview exclusive.
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Monsieur Baba Ladé, vous êtes rentré au Tchad, est-ce qu’on peut savoir
dans quel contexte vous aviez signé
votre retour ?
votre retour ?
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Merci
beaucoup, M. François. Je suis rentré à
la demande du chef de l’Etat qui m’a contacté directement par deux de ses
émissaires, il y avait l’ex ministre de l’intérieur du Niger et un ex
conseiller du président centrafricain qui sont partis me voir. Mais bien avant ça,
j’avais pris contact le 30 Octobre avec le chef de l’Etat nigérien Mamadou
Issoufou. C’est depuis lors que les contacts ont été rétablis avec N’Djamena.
-
Alors, vous êtes rentrés, or il se trouve que le Camerounais accuse vos
anciens éléments de vouloir déstabiliser une partie du Cameroun et ainsi
chercher à renverser les autorités camerounaises à travers une rébellion.
Est-ce que Baba Ladé est derrière cette rébellion ?
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C’est
vrai, les rumeurs ont toujours circulé, bien avant que je quitte même le Tchad
au mois de septembre dernier, j’étais conseiller au premier ministre nommé le
14 janvier 2012. J’avais appris comme tout autre que le Cameroun accuse mes ex
combattants restés en territoire centrafricain, ceux qui ne sont pas retenus au
Tchad qui sont aussi repartis là-bas en Centrafrique de vouloir déstabiliser le
Cameroun. Cela m’a beaucoup étonné d’autant que les éléments restés fidèles à
nous sont restés toujours dans le triangle des trois pays, Centrafrique,
Cameroun, Tchad dans la zone de Ngaoundaï en Centrafrique. Ceux qui opèrent
contre le Cameroun sont au sud de la Centrafrique et même presque le sud du
Cameroun. Lorsqu’on a fait des renseignements, on a trouvé qu’ils sont dans la
zone de Berbérati, ceux qui opèrent contre le Cameroun. Nous, bon…Quel est
notre travail, quand on écoute que les gens nous accusent, il faut chercher
d’abord à savoir, on a des hommes, on ne peut pas dire que ce ne sont pas nos
éléments, il faut qu’on vérifie. Nous avons vérifié et j’avais un ex officier
qui a regagné la Séléka et qui était chef de région de Berberati. Je lui ai
demandé, mais c’est quoi cette histoire ? il me disait que vraiment
eux-mêmes ils apprennent que ces gars nous appartiennent. J’ai dit mais est-ce
que réellement les gars nous appartiennent ? J’ai dit ensuite mais est-ce
que réellement les gars sont nos anciens combattants ? il a dit,
personne ! parce ce qu’ils viennent s’approvisionner à Berbérati donc il
les connait, il connait même leur chef. Je dis mais il n’y a même pas nos
anciens éléments parmi eux ? il a
dit il n’y en a pas. Je dis bon, mets-moi en contact avec eux. Il avait leur
numéro de téléphone Thuraya, il m’a
envoyé, j’ai tenté de joindre le numéro Thuraya mais ça ne passait pas, je lui
ai dit, bon, leur numéro Thuraya ne passait pas, donc donne-leur mon numéro,
parce que j’étais au Niger entretemps, je veux connaitre ces gens-là ! Lorsqu’il
leur a remis le numéro, ils m’ont appelé, c’est leur chef même. Il me
dit qu’il s’appelle général Ali. Je lui ai dit mais vous êtes de quelle rébellion ?
il m’a dit qu’ils sont des rebelles camerounais. Je dis mais pourquoi vous
agissez en mon nom, au nom au de Baba Ladé ? il m’a dit non, eux-mêmes ils
apprennent comme tout autre qu’ils sont des éléments de Babé Ladé mais jamais,
ils ne sont pas des éléments de Baba
Ladé, mais ils sont des rebelles camerounais. Voilà, moi j’ai compris que,
peut-être ça serait une confusion de nom, puisque moi-même j’ai un Ali,
qui est le chef d’Etat-major du FPR, il s’est aussi autoproclamé général
(sourire…), donc je crois que c’était une confusion de nom. Depuis lors, je
leur ai dit merci beaucoup, mais de
toutes les manières, je vous conseille de ne pas faire la rébellion, il faut
accepter de rentrer dans la légalité. Voilà c’est tout ce que je leur ai dit. Depuis
lors, je n’ai pas eu un autre contact avec eux, comme j’ai vérifié et j’ai
trouvé qu’ils ne sont pas sous mes ordres, donc cela ne nous regarde pas.
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Mais, tout de même, ça a provoqué des inquiétudes aussi bien du côté du
Cameroun que du côté du Tchad, parce que, vous êtes sans ignorer que le Tchad a
d’normes intérêts économiques au Cameroun, tous nos biens presque passent par
le port de Douala, deuxième raison fondamentale, le pétrole tchadien est
exploité grâce à un pipeline de 1070 km qui relie la ville de Doba à Kribi au
Cameroun. Alors, qu’est-ce que vous pouvez dire, monsieur Baba Ladé, pour
rassurer aussi bien les autorités camerounaises que tchadiennes, que vous
n’êtes pas impliqué dans tout ce qui se passe au Cameroun et que vous œuvrez
plutôt pour la paix ?
-
Oui,
lors de mon retour, le 3 février (2014), j’ai rencontré le chef de l’Etat, son
Excellence Idriss Déby Itno, pendant notre entretien où il m’a reçu en
audience, je crois qu’il m’a aussi montré l’inquiétude du Tchad, que du côté Cameroun.
Je lui ai expliqué comme je venais de vous expliquer, j’ai dit, Excellence,
vraiment moi-même j’ai appris comme tout autre, mais j’ai cherché à vérifier
les faits sur cette rébellion, j’ai cherché à entrer en contact pour savoir
est-ce qu’ils appartiennent au FPR ou non ? et j’ai trouvé qu’ils ne sont pas du FPR.
Donc soyez rassurés que le Tchad reste bien Blanchi devant les Camerounais. Ce
n’est pas un tchadien qui fait ça. Moi encore je suis très loin de cette
histoire. Bon, mais si c’est une rébellion peuhle qui agit au Cameroun, ce
n’est pas mon problème, c’est un problème des Camerounais. Ça ne regarde que le
Cameroun, donc, moi je crois que j’ai blanchi quand-même le Tchad devant le
Chef de l’Etat, on ne peut pas mentir quand-même à un chef de l’Etat donc, tout
ce que j’ai dit, c’est ça la vérité. J’ai dit au Chef de l’Etat que moi j’ai fait
la brousse. Je connais de la frontière du Tchad jusqu’en Centrafrique, au
Cameroun, au Sud Soudan, en Ouganda… donc, si c’est le Tchad qui m’envoie
peut-être ailleurs pour aller peut-être enlever les épines (sourire…), moi je
suis militaire, si on me demande de tirer je tire, si on me demande de
faciliter, je peux être facilitateur donc pour ça je suis prêt à aider le
Tchad. Je suis venu pour œuvrer pour la paix, j’ai transmis mes doléances au
Chef de l’Etat et j’attends la décision de mon président.
-
Dernière question, Monsieur Baba Ladé : votre groupe
politico-militaire a œuvré à l’époque d’une mauvaise manière, aujourd’hui vous êtes
rentré dans la légalité, depuis l’année dernière vous êtes rentré au pays sans
condition comme vous l’aviez dit et fait, aujourd’hui, quel rôle Baba Ladé va
jouer ? Est-ce que votre mouvement rebelle s’est transformé en parti
politique ?
-
D’abord
notre rébellion était une rébellion vraiment exemplaire ; là je vais vous
le dire. Je crois qu’au retour vous avez suivi même les chaînes internationales
qui ont parlé des éléments disciplinés. Et j’ai eu beaucoup de journalistes qui
sont partis sur le terrain, qui m’ont rencontré et qui m’ont dit, par comment
j’ai fait pour que les gars aient une discipline ? Donc, il n’y a pas
longtemps, lors de nos accords avec N’Djamena à Bangui, là où s’étaient nos
actions, le préfet de la région disait qu’il n’a jamais vu une rébellion
exemplaire, parce qu’ils ont vu des rébellions centrafricaines qui ont fait des
exactions, qui ont arraché, qui ont fait
tout, mais nous, nos éléments n’ont même pas pris une épingle sur sa
population, le préfet est là, et je crois que je me réjouis de ça. C’est pour
vous dire que lorsque nous avons accepté de rentrer, sans condition nous avons
accepté la politique du président Déby. Mais seulement il a été dit dans un
point, qui est le point 5 du communiqué final qu’on devrait chercher un pays
pour finaliser la paix ? qu’est-ce
qu’on entend par chercher un pays ou un lieu pour finaliser la paix ? donc
c’était un accord qui devrait être fait ? on m’a convaincu que mon chef
d’Etat a besoin de moi, de venir discuter dans son salon à N’Djamena, et, maintenant
on aura le temps de discuter entre tchadiens, c’est-à-dire que le point 5
regardait maintenant la réinsertion et l’intégration de nos éléments, c’est ce
qui n’a pas été fait et qui m’a un peu dérangé tout dernièrement, mais pour le
moment, je crois qu’on a mis le point sur tout, nos doléances sont devant le
chef de l’Etat, que ce soit du parti ou des éléments restés derrière nous, tout
dépend maintenant de la volonté du Chef de l’Etat.
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François Djékombé : Je vous remercie.
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Baba
Ladé : Merci.
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